Amazon tire un trait sur Chime, sa plateforme de visioconférence lancée en 2017 pour concurrencer Zoom et Microsoft Teams. Cette décision marque un tournant pour AWS, le leader du Cloud, qui semble se détourner progressivement des solutions SaaS (Software as a Service) dédiées à la bureautique. En abandonnant ce segment, Amazon laisse ainsi le champ libre à son principal rival, Microsoft, dont les produits Office 365 et Teams dominent largement le marché.
Mais cette décision n’est pas isolée. Elle s’inscrit dans une tendance plus large qui interroge la stratégie d’Amazon Web Services. En effet, AWS a récemment choisi Microsoft comme fournisseur interne pour ses propres besoins en solutions bureautiques, un aveu de taille qui soulève une question cruciale : Amazon peut-il encore prétendre au leadership du Cloud alors qu’il se met lui-même en retrait de certains secteurs stratégiques ?
Chime : une alternative ambitieuse mais peu adoptée
Lors de son lancement, Amazon Chime se voulait une alternative crédible aux solutions de visioconférence déjà bien établies comme Zoom, Skype et Microsoft Teams. Avec une intégration poussée aux services AWS et une infrastructure Cloud performante, Chime offrait une expérience fluide et sécurisée aux entreprises.
Cependant, malgré ces atouts, la plateforme n’a jamais réellement réussi à s’imposer. Microsoft Teams, intégré à la suite Office 365, et Zoom, qui a su capitaliser sur l’explosion du télétravail, ont rapidement écrasé la concurrence. Amazon Chime est resté un acteur de niche, utilisé principalement par les clients AWS, mais sans jamais atteindre une adoption massive.
Face à ce constat, Amazon a décidé de mettre un terme à Chime, préférant concentrer ses efforts sur d’autres segments plus rentables du Cloud.
Amazon se détourne du SaaS bureautique, Microsoft en profite
La fin de Chime ne représente pas seulement l’échec d’un service parmi d’autres. Elle illustre un mouvement plus large : le désengagement progressif d’Amazon du marché des logiciels bureautiques en mode SaaS.
Amazon Web Services a historiquement dominé le secteur du Cloud avec ses infrastructures IaaS (Infrastructure as a Service), permettant aux entreprises d’héberger et de gérer leurs applications. Mais en matière de SaaS, et plus particulièrement de logiciels collaboratifs et bureautiques, AWS peine à rivaliser avec Microsoft et Google.
Microsoft, avec sa suite Office 365 et Teams, s’est imposé comme le choix privilégié des entreprises, bénéficiant de son intégration native avec Windows et Azure. De son côté, Google Workspace séduit les startups et les entreprises adeptes du travail collaboratif en ligne.
En abandonnant progressivement ses propres solutions SaaS, Amazon laisse le champ libre à Microsoft, qui renforce ainsi sa domination sur ce segment stratégique.
Un choix stratégique troublant : AWS choisit Microsoft pour ses propres besoins
La décision la plus surprenante d’Amazon ne réside peut-être pas dans l’arrêt de Chime, mais dans son choix de Microsoft comme fournisseur interne pour ses services bureautiques.
Amazon a récemment décidé d’utiliser Microsoft 365 pour équiper ses propres employés, délaissant ainsi ses alternatives internes. Ce choix stratégique en dit long sur la place qu’occupe Microsoft dans l’écosystème bureautique et collaboratif.
En tant que numéro un du Cloud, AWS aurait pu capitaliser sur ses propres solutions, ou du moins privilégier une alternative plus neutre comme Google Workspace. Or, en optant pour Microsoft, Amazon reconnaît implicitement la supériorité de son concurrent dans ce domaine.
Ce revirement est un signal fort pour le marché : AWS, leader incontesté de l’infrastructure Cloud, semble de plus en plus dépendant de son principal rival pour les services de productivité et de collaboration.
Amazon peut-il rester leader du Cloud ?
Ces choix stratégiques soulèvent une question essentielle : Amazon peut-il conserver son leadership sur le marché du Cloud alors qu’il cède du terrain sur plusieurs segments clés ?
AWS reste aujourd’hui le leader incontesté du Cloud public, avec une part de marché estimée à environ 30 %, loin devant Microsoft Azure et Google Cloud. Cependant, Microsoft continue de grignoter des parts de marché, notamment grâce à l’intégration étroite de ses services Cloud avec ses logiciels bureautiques.
En se retirant progressivement du SaaS collaboratif, Amazon semble renforcer malgré lui l’emprise de Microsoft sur l’environnement de travail des entreprises. Or, le Cloud ne se limite pas aux infrastructures : les services SaaS et PaaS (Platform as a Service) sont de plus en plus stratégiques.
Microsoft sait très bien qu’en déployant Microsoft 365 chez ses clients – même utilisateurs d’AWS – il sera bien plus facile de les convertir à Azure ensuite.
Conclusion
La fin de Chime n’est pas seulement l’échec d’un produit, mais le symptôme d’un repositionnement stratégique d’Amazon sur le marché du Cloud. En abandonnant ses ambitions dans le SaaS bureautique et en choisissant Microsoft pour ses propres besoins internes, AWS envoie un signal fort au marché.
Si Amazon demeure aujourd’hui le numéro un du Cloud, son désengagement progressif de certains secteurs laisse entrevoir un affaiblissement de son emprise, au bénéfice de Microsoft.
La question reste donc ouverte : AWS pourra-t-il maintenir son leadership en se concentrant uniquement sur l’infrastructure, ou devra-t-il revoir sa stratégie face à un Microsoft de plus en plus conquérant ? L’avenir du Cloud pourrait bien se jouer sur ces choix stratégiques. 😉